TRANSITION (MÉTAUX DE)

TRANSITION (MÉTAUX DE)
TRANSITION (MÉTAUX DE)

Les cinquante-six éléments chimiques dits de transition actuellement connus comportent tous, soit à l’état d’élément simple, soit dans un état oxydé stable, une sous-couche électronique d ou f partiellement remplie. L’existence de niveaux profonds incomplets leur confère des propriétés voisines. À l’état de corps simples, ils se caractérisent par un haut point de fusion et une densité élevée. Ils présentent quelquefois des propriétés physiques anormales (ferromagnétisme, supraconductivité). Leur grande aptitude à former entre eux ou avec certains non-métaux (H, C, N, O) des alliages ou des solutions solides très résistants leur vaut un rôle primordial en métallurgie avancée (aciers spéciaux), en aéronautique (alliages au titane) et en physique nucléaire (piles). Fortement électropositifs, les éléments de transition, à l’exception des métaux nobles, se dissolvent généralement dans les acides minéraux. Leur oxydation conduit souvent à plusieurs degrés stables et dote les ions de propriétés paramagnétiques. L’existence simultanée de valences multiples explique leur tendance à la formation de phases non stœchiométriques, ainsi que les propriétés physiques particulières de certains composés et de quelques complexes, propriétés physiques largement utilisées par l’industrie (ferrites en informatique, grenats dopés pour l’émission laser par exemple). Les nombreuses applications des éléments de transition et de leurs dérivés en font ainsi des matériaux d’une importance économique essentielle: cela explique qu’ils ont été l’objet de nombreuses recherches.

Propriétés atomiques

Les éléments de transition se caractérisent par une participation des orbitales d à la liaison chimique. Cette définition englobe donc tous les atomes et les ions qui possèdent une sous-couche d incomplète: 3d du scandium au cuivre, 4d de l’yttrium à l’argent et 5d du lanthane à l’or. Le remplissage progressif des sous-couches 4f et 5f conduit aux séries des «éléments de transition interne»: les lanthanides (du cérium au lutétium) et les actinides (de l’actinium au lawrencium). On répertorie ainsi, sous l’expression d’éléments de transition, 56 des 103 éléments connus de la classification périodique.

L’évolution de leur cortège électronique se traduit par une variation du nombre d’électrons dans les couches profondes (n 漣 1)d ou (n 漣 2)f , la couche externe ne comportant au maximum que deux électrons ns , à l’exclusion de tout électron np . Il en résulte de grandes analogies entre tous ces éléments de transition.

La majeure partie de leurs propriétés s’explique à l’aide de la théorie du champ des ligands (ou «champ des coordinats»), qui considère la force des liaisons covalentes entre un atome (ou un ion) de transition A et un groupe de n ligands X en fonction de la symétrie du complexe AXn formé. La dégénérescence des cinq orbitales d de A est alors levée, les trois orbitales t 2g (d xy , d yz et d zx ) étant par exemple stabilisées en champ octaédrique (c’est l’inverse en champ tétraédrique) au détriment des deux orbitales e g (d x 2 size=1 y 2 et d z 2) d’une énergie c . Pour un atome (ou un ion) A donné, l’éclatement c dépend de la nature du ligand ; au sein de la série néphélauxétique, il augmente dans l’ordre:

Pour un ligand donné, l’énergie c augmente par passage de la couche 3d à la couche 4d ; elle dépend en outre de la symétrie de l’édifice, puisque, par exemple, tétra = 4/9 ( octa). L’énergie c augmente enfin avec la charge de l’ion.

En présence d’un champ magnétique H, chacun des deux niveaux t 2g et e g éclate: un sous-niveau 見 peuplé d’électrons de spin + 1/2 (face=F0019 樂) est stabilisé d’une énergie d’échange ex par rapport au sous-niveau 廓 peuplé d’électrons de spin 漣 1/2 (face=F0019 醴). Selon les valeurs respectives de c et de ex, la répartition des électrons d’une configuration d n (0 麗 n 麗 10) conduit à des valeurs de spin différentes lorsque 4 諒 n 諒 7 en champ octaédrique: si cex, le spin résultant est maximal et le système est à «spin fort» (high spin ); dans le cas contraire, où la règle de Hund précisant l’ordre de remplissage des sous-couches ne s’applique plus, le spin est minimal et le système comporte un état à «spin faible» (low spin ). Les cyanures de la première série de transition sont tous dans ce dernier état. Dans les oxydes, le problème est plus complexe puisque les cations divalents sont à spin fort, les tétravalents à spin faible, les trivalents étant intermédiaires: par exemple, les ions Co3+ (S = 2) et CoIII (S = 0) dans la figure 1.

Du fait de leur configuration électronique particulière, les éléments de transition perdent aisément leurs deux électrons périphériques ns (un seul pour Cu, Ag, Au). L’ionisation se poursuit souvent par départ d’électrons d pour s’arrêter selon les cas aux configurations stables (n 漣 1)d 0 ou (n 漣 1)d 5. Il en découle que le degré d’oxydation + 2 est souvent très stable, surtout pour les éléments de la première série de transition. En fait, plusieurs degrés d’oxydation sont possibles; ils coexistent généralement au sein d’une même phase (les ions Fe2+ et Fe3+, par exemple, dans la magnétite Fe34). Dans le cas des lanthanides, le degré le plus stable est, par contre, + 3.

Le rayon atomique des éléments de transition augmente avec le nombre quantique n de 0,01 nm environ entre les couches 3d et 4d , mais de 0,002 nm seulement entre les couches 4d et 5d par suite du phénomène de contraction lanthanidique; il diminue régulièrement avec le numéro atomique Z le long d’une période (r proportionnel à n 2/Z). Leurs rayons ioniques diminuent avec la charge (Ti0 = 0,147 nm, Ti2+ = 0,085 nm, Ti4+ = 0,068 nm). La décroissance du rayon ionique avec Z au sein d’une même période n’est régulière qu’avec les électrons f ; avec les électrons d , le remplissage des niveaux e g antiliants provoque une discontinuité de variation au voisinage des configurations d 3 et d 8 (fig. 2). Il est plus limité pour un état à spin faible que pour l’état à spin fort correspondant.

Propriétés structurales

Ayant une symétrie essentiellement sphérique, presque tous les éléments de transition cristallisent avec des structures à coordinence élevée (hexagonal compact, cubique à faces centrées, cubique centré). Ils forment soit entre eux, soit avec d’autres métaux des solutions solides, continues ou non, selon leurs structures et leurs rayons atomiques. La nature des phases intermétalliques susceptibles d’apparaître découle des règles de Hume-Rothery , en considérant comme nul le nombre d’électrons de valence des groupes du fer et du platine.

Hydrures, borures, carbures et nitrures des éléments de transition correspondent généralement à des phases d’insertion de l’élément léger dans le réseau métallique.

Les éléments de transition forment avec l’oxygène et les halogènes de nombreux composés binaires ou ternaires. Le réseau anionique imposant la structure par suite de la forte covalence des liaisons, il n’est donc pas surprenant d’observer l’existence de séries isostructurales pour ces composés (les oxydes MO sont tous de type NaCl alors que les sulfures correspondants appartiennent souvent au type NiAs). Ces séries s’avèrent importantes pour les applications industrielles dans la mesure où elles permettent de moduler à la demande les propriétés du matériau considéré.

La coexistence en proportions variables d’ions de valences différentes autorise la formation de larges domaines de non-stœchiométrie et rend possible l’insertion éventuelle d’impuretés étrangères au réseau d’hôte (lasers). Elle explique également les remarquables propriétés catalytiques des éléments de transition et de leurs composés.

Propriétés physiques

Les éléments de transition et leurs composés présentent une température de fusion souvent très élevée (TF = 3 400 0C pour W), propriété qui les fait utiliser comme résistors de fours électriques et comme réfractaires (aciers spéciaux en aéronautique, gaines de protection). Ce sont en outre des matériaux particulièrement denses (d = 22,7 pour Os). Ils ont une dureté considérable (+ 9 de l’échelle de Mohs pour le carbure de tungstène).

À l’état d’éléments simples, ils constituent de bons conducteurs électroniques dont quelques-uns sont ferromagnétiques (Fe, Co) et d’autres supraconducteurs (V, Nb) à très basse température (réalisation de hauts champs magnétiques).

Si l’existence d’électrons f non appariés confère le plus souvent aux composés des lanthanides les propriétés des électrons localisés (paramagnétisme de Curie, isolant de bandes), la présence d’électrons d célibataires provoque chez les composés de transition des effets différents selon les cas: les électrons sont soit localisés, soit collectifs (paramagnétisme de Pauli, conduction métallique). Une transition isolant-métal peut même se produire lorsque s’élève la température (Tt = 340 K pour V2). Au sein d’une série isostructurale, tout déplacement vers la droite renforce le caractère localisé des électrons par suite de la contraction des orbitales d du cation.

La coexistence, dans divers sites cristallographiques d’une structure donnée, d’ions de transition de nature et (ou) de charges différentes provoque la création de couplages ferro- et antiferromagnétiques entre les spins. Il en résulte parfois un moment non nul, ce qui offre un grand intérêt industriel (les ferrites servent de mémoires dans les ordinateurs). La conduction s’effectue souvent dans les oxydes par sauts d’électrons.

Dans leur degré d’oxydation maximal, les ions de transition favorisent la ferroélectricité. Douées d’une permittivité électrique élevée, de telles substances servent de base à l’industrie des condensateurs électriques et des céramiques.

Pour les lanthanides, l’existence de niveaux d’énergie discrets favorise l’apparition de transitions radiatives, sources de propriétés optiques utilisées dans de nombreuses applications (télévision en couleurs par exemple).

La radioactivité des actinides et de quelques isotopes (55Fe, 60Co) et ses applications sont enfin bien connues.

Propriétés chimiques

La chimie des éléments de transition s’avère très riche puisqu’elle englobe la chimie de coordination et la chimie du solide. Très fortement électropositifs, les éléments de transition sont des réducteurs puissants qui réagissent facilement avec la plupart des agents chimiques. Leur oxydation mène à plusieurs stades de stabilité variable, ce qui provoque parfois leur dismutation:

L’oxyde supérieur correspond à un anhydride d’acide si sa charge est supérieure à + 5 (V25, Cr3). Les métaux de transition passent en solution, à l’exception des métaux nobles (Au, Pt), sous l’action des acides. En solution basique, l’ion formé s’hydrolyse par suite de son caractère acide; le stade final est l’hydroxyde M(OH)n insoluble dans l’eau. La tendance à la condensation des anions complexes semble générale; elle s’accompagne d’un abaissement du pH.

Dans un complexe, à tout ligande peut être substitué un ligande plus fort. La symétrie du complexe dépend de la configuration électronique, un d 5 étant souvent tétraédrique, un d8 plan-carré par suite de l’effet Jahn-Teller . Parmi les complexes connus, les métaux cabonyles et les molécules « sandwich» jouent un rôle particulier compte tenu de leurs propriétés.

La chimie du solide des éléments de transition est en pleine expansion. De nombreux composés inédits, stœchiométriques ou non, ont ainsi été mis en évidence, et en particulier les bronzes oxygénés Mx TOy où l’élément de transition T se trouve présent avec deux degrés d’oxydation différents avec une proportion qui dépend du taux x en métal M (souvent un alcalin) inséré dans les lacunes du réseau de l’oxyde TOy .

Encyclopédie Universelle. 2012.

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